académie de rennes - svt - articles scientifiques
académie de rennes - svt - articles scientifiques
daniel cuche -
professeur de svt au lycée chateaubriand de rennes
bernard le vot - inspecteur général de l'education nationale
l'esb, encéphalopathie
spongiforme bovine, qui défraie tant la chronique
actuellement n'est qu'une des maladies neurodégénératives affectant
plusieurs espèces de vertébrés - essentiellement dans la classe des
mammifères - dont l’étude a conduit à envisager l'existence d'un
type nouveau d'agent pathogène : le prion.
1. les
encephalopathies spongiformes subaiguËs transmissibles (esst).
1.1. recensement
on les connaît chez de
nombreuses espèces de mammifères et parfois depuis longtemps. ainsi la
"tremblante du mouton" est répertoriée en angleterre depuis
1732 au moins et la maladie de creutzfeld-jakob (mcj), affectant
l'homme, est décrite pour la première fois en 1920.
les formes animales les plus connues sont la "tremblante du
mouton" touchant les ovins et les caprins, l'esb plus connue chez
les bovins sous le nom de "maladie de la vache folle" mais qui
atteint également les ruminants exotiques (exemple de l’antilope
koudou du zoo de londres). les carnivores ne sont pas épargnés avec
l'encéphalopathie du vison aux usa, l'encéphalopathie spongiforme
féline (chat domestique, puma et guépard au zoo).
quant à l'homme, deux affections dominent : le kuru qui a sévi en
nouvelle guinée jusqu’en 1974 et presque totalement éteint et la mcj
dont un nouveau variant (nvmcj) apparaît en grande bretagne en 1996.
2.2. caractéristiques
toutes ces esst se
traduisent par un tableau clinique offrant de nombreux points communs :
troubles de la motricité (équilibre, incoordination des mouvements,
tremblements), de la sensibilité (réactions exagérées au contact, au
bruit), des comportements (crainte ou agressivité puis torpeur) et,
chez l'homme, une démence progressive plus ou moins précoce. ces
symptômes sont l'expression d'une atteinte du système nerveux central
notamment du cervelet, impliqué dans la coordination des mouvements, et
des centres cérébraux supérieurs supportant les fonctions cognitives,
la mémoire et les schémas comportementaux. actuellement, l'affection
est inéluctablement mortelle et l'étude neuropathologique des cerveaux
prélevés lors de l'autopsie confirme chez l'animal et l'homme
l'existence d'une dégénérescence encéphalique :
spongiose (le tissu
nerveux a l'aspect d'une éponge) qui correspond à la vacuolisation
des neurones atteints et aux "trous" laissés par leur
disparition finale,
"plaques amyloïdes" dans
les espaces intercellulaires, correspondant à des dépôts
protéiques.
coupe
histologique dans le cortex d'un cerveau humain atteint de la
maladie de creutzfeld-jakob.
photographie
aimablement prêtée par "university of iowa's virtual
hospital" (usa).
coupe
histologique dans un cerveau humain atteint par le kuru.
photographie
aimablement prêtée par "university of iowa's virtual
hospital" (usa).
coupe
histologique dans un cerveau humain atteint par le kuru. on y
distingue des plaques amyloïdes dans les espaces
intercellulaires.
photographie
aimablement prêtée par "university of iowa's virtual
hospital" (usa).
coupe
histologique dans une moelle de vache atteinte
d'encéphalopathie spongiforme bovine.
photographie
aimablement prêtée par national
institute of animal health (japan) photographed by dr. m. kubo
niah.
coupes
histologiques dans la substance grise d'un cerveau de mouton. on
observe nettement sur la photographie de droite une grande
vacuole dans chacun des deux neurones. cette vacuole pousse sur
les bords de la cellule le noyau et les autres organites
cytoplasmiques.
photographies
aimablement prêtées par
dr.
r. higgins, school of veterinary medicine, university of
california, davis (usa).
3.3. modes de
transmission
des études
épidémiologiques remarquables ont conduit à envisager la
transmissibilité de ces maladies par voie orale : le kuru rattaché
avec certitude (voir plus loin) à la pratique du cannibalisme rituel
dans la tribu fore de nouvelle guinée, l'esb reliée à la consommation
de farines animales issues de carcasses d'ovins et de bovins atteints,
le nvmcj par consommation de "vache folle". la transmission
expérimentale par voie parentérale est aussi possible : injections
intracérébrales d'extraits d'organes atteints à des ruminants, des
rongeurs (souris, hamster), des primates ; transmissions accidentelles
lors d'opérations (greffes de dure-mère, de cornée) ou de traitements
(hormone de croissance isolée à partir d'hypophyses de patients
décédés de la mcj). l’effet, chez l’animal, de la scarification
expérimentale des gencives sur la transmission par ingestion orale,
fournit au moins une explication de celle–ci (v.§ iii).
il a ainsi été établi la variabilité de la période
d'incubation en fonction de l'espèce et du mode d'inoculation. chez
l'homme, l'incubation du kuru était égale ou supérieure à 20 ans,
celle de la mcj après greffe ou injection variait de 7 mois à plus de
10 ans. il faut dire enfin que, au moins chez l’homme, on peut
identifier une prédisposition héréditaire à la transmission de la
mcj (v.§.ii)
ces maladies
neurodégénératives, assez bien
caractérisées au plan clinique, sont –quoique inégalement-
transmissibles sans que soit identifié un agent infectieux de type
protiste, bactérie ou virus. lorsqu’elles sont éradiquées, c’est
par interruption de la voie de contamination (cas du kuru). elles posent
la question d’un agent causal commun , de type nouveau.
2. un agent
transmissible non conventionnel (atnc) : le prion.
2.1. propriétés
caractéristiques de l’agent transmissible
l'agent des esst n'est
pas conventionnel à plusieurs égards. d'abord il affecte des groupes
phylogénétiquement parfois éloignés : ovins, caprins, bovins mais
aussi rongeurs, mustélidés, félidés, primates dont l'homme. ensuite
des extraits purifiés de cerveau atteint conservent leur infectiosité
(pouvoir infectieux) malgré une exposition aux ultraviolets, aux
radiations ionisantes, à la chaleur humide ou sèche (130°c), aux
protéases, aux nucléases, ce qui conduit à envisager l'intervention
d'un agent non cellulaire et même non viral, dépourvu d'acide
nucléique !
2.2. recherche de l’agent
transmissible : concept de prion et protéine prp
les travaux de prusiner
et de son équipe, à partir des années 1980, confirment le caractère
très particulier de l'agent supposé responsable. des extraits
hautement purifiés de cerveaux de hamster auxquels on a inoculé la
"tremblante" contiennent une glycoprotéine hydrophobe qui se
révèle étroitement liée au pouvoir infectieux. pour cette raison,
cette glycoprotéine, ensuite identifiée comme constituant essentiel
des "plaques amyloïdes" observées dans les cerveaux
atteints, a été baptisée prion (pour "protinaceus infectious
particle") et notée prp (pour "protease resistant
protein"). les études ultérieures du prion, menées in
vitro et en microscopie électronique, montrent qu'il s'agit d'une
molécule globulaire capable de s'agréger en filaments de 10-20 nm de
diamètre et de 100-200 nm de long en formant les "plaques
amyloïdes".
photographie
extraite de "columbia university - record - vol.23,
n°7, october 24, 1997"
en
janvier 2000, des chercheurs du fonds national suisse ont
dévoilé la structure tridimensionnelle de la prp saine
de l'homme. le domaine, de forme sphérique, contient
trois sections en spirale, une structure en forme de
dépliant et un fil.
document
aimablement prêté par le site du courrier de
l'environnement de l'inra (dessin non original).
représentation
de la forme normale de la protéine prp (à gauche) et de
la forme infectieuse (à droite), le prion (prp-res),
selon l'équipe de stantley b. prusiner
en 1985, grâce au génie
génétique, le gène de la prp est localisé, séquencé et on constate
avec surprise, qu'il est normalement fonctionnel et se retrouve
étonnamment semblable dans le génome
normal des espèces sensibles. le gène de la prp normale, cellulaire
(notée prpc) est morcelé en 2 ou 3 exons suivant les espèces. chez
l'homme, où il est localisé sur le chromosome 20, un certain nombre de
mutations ont été répertoriées dont certaines prédisposent aux esst
et - ou - en influencent le cours
(âge d'apparition, durée d'évolution, séquence des symptômes),
expliquant la diversité des esst et les maladies familiales
(héréditaires).
la prpc est synthétisée
dans le réticulum endoplasmique des neurones (parmi d'autres cellules
productrices), glycosylée dans l’appareil de golgi et sécrétée à
la surface de la cellule où elle s'ancre dans le plasmalemme. elle est
rapidement recyclée grâce à sa sensibilité aux protéases. son rôle
paraît énigmatique puisque des souris transgéniques dépourvues du
gène de la prpc ne semblent manifester aucun trouble majeur, sauf - peut-être
- une légère diminution des capacités de mémoire et d'apprentissage.
la résistance de ces souris à l’inoculation des esst atteste du
rôle central que joue la prp dans celles - ci. récemment l'équipe
cnrs-institut pasteur d'odile kellermann (voir "pour la
science" n°278-décembre 2000-p.21) a observé que la stimulation
de la prpc sur la face exocellulaire du plasmalemme enclenche une
réaction en face endocellulaire; la prpc serait ainsi impliquée dans
une transduction de signal (nerveux ? hormonal ? ).
2.3. de la prp au prion
les esst semblent donc
causées par l'accumulation dans le milieu extracellulaire et dans les
lysosomes des neurones atteints, d'une
forme anormale de la prp, notée prpres du fait de sa résistance aux
protéases qui assurent normalement le recyclage de la prpc. l'étude
structurale comparée de la prpc et de la prpres est instructive : à
séquence primaire identique, la première est riche en hélices a (42%)
tandis que la seconde compte 43% de feuillets b . la maladie semble le
résultat de la conversion de la prpc en prpres par un changement de
conformation expliquant la grande résistance de la prpres aux agents
physico-chimiques puisque les feuillets b autorisent une plus grande
compacité moléculaire que les hélices a , conférant notamment une
protection contre l’hydrolyse.
ainsi la prp constituant les "plaques amyloïdes" est
synthétisée par l'animal malade et devient prion par changement de
conformation, après infection par le prion pathogène provenant d'un
autre animal atteint, de même espèce ou non.
inventer le prion remet en cause un dogme de la biologie qui veut que
toute reproduction fasse intervenir une information moléculaire
représentée par au moins un acide nucléique. l’invoquer ne répond
pas à toutes les questions et en particulier pas à celle de son
mécanisme d'action.
voir
des molécules de prions en 3d
3.
incertitudes sur l’atnc et possibilites de lutte
3.1. un concept en
discussion
l’unanimité n’est
pas faite autour du prion en tant qu’agent infectieux des esst. pour
certains auteurs la prp doit, en réalité, être associée à un acide
nucléique et l'atnc serait à rapprocher des virus, mais il resterait
original par ses très faibles dimensions. la longue période
d'incubation peut évoquer les rétrovirus. mais toutes les tentatives
de mise en évidence d'un acide nucléique (adn ou arn) dans les
extraits purifiés infectieux ont échoué. de plus l'absence de
réactions immunitaires ne milite pas en faveur de cette hypothèse sauf
à invoquer un virino, c'est à dire un acide nucléique étranger de
très petite taille, enveloppé de protéines de l'hôte ; mais alors
quel mode d'action réserver à cet adn ou arn ?
prusiner, auteur de la notion de prion, en a d'abord fait une protéine
infectieuse, autoréplicable sans le
secours d'un quelconque acide nucléique. puis le prion est devenu le
produit du changement de conformation d'une protéine normale : la prpc
est convertie en prpres. cette dernière pourrait servir de
"moule" de conversion à la prpc, à la manière d'une
chaperonine*, ce qui, s’ajoutant à la
résistance au recyclage normal, expliquerait la
"multiplication" de la forme pathogène sans intervention d'un
acide nucléique. mais comment l'infection par une protéine peut-elle
passer par l'alimentation ? certes la prpres est caractérisée par sa
résistance aux protéases et peut
échapper ainsi à la digestion mais il reste la question du
franchissement de la barrière intestinale, normalement imperméable aux
protéines. comme il a déjà été dit plus haut (v.§.i), des
expériences de transmission orale de la "tremblante" ont à
cet égard montré le rôle très favorisant de lésions gingivales par
lesquelles l'agent pathogène pourrait passer dans le sang et la lymphe.
3.2. les précautions à
prendre
malgré et à cause de
ces incertitudes persistantes, des précautions élémentaires ont dû
être prises :
stérilisation
renforcée des instruments chirurgicaux pour tenir compte de la
résistance exceptionnelle de l'atnc,
utilisation de
neurohormones "propres" issues du génie génétique,
alimentation
sécurisée par l'interdiction à la distribution des organes à
risques du bœuf **, par l'interdiction des farines animales dans
l'alimentation du bétail quel qu'il soit, en raison des
possibilités de franchissement de la barrière interspécifique.
l'imparfaite connaissance
de l'agent pathogène et de son mode d'action entache d'une marge
d'erreur importante toute tentative de projection épidémiologique
concernant le développement chez l'homme du nvmcj. a l'heure actuelle
on a recensé en france moins de 5 cas, chiffre sans commune mesure avec
celui qui concerne l'épidémie de sida (les durées d’incubation sont
fort différentes il est vrai …) et si les mesures prises récemment
sont justifiées, toute psychose serait exagérée. somme toute, le kuru
a, en quelques années, quasiment disparu avec la fin du cannibalisme
rituel …
la compréhension des
maladies classiques a permis de les combattre efficacement ce qui fait
d'autant mieux ressortir les nouvelles pathologies. l’exploration de
ces dernières permet de mettre au jour de nouvelles entités, des
mécanismes inédits et ainsi de faire progresser constamment notre
connaissance des êtres vivants. cela passe, comme toujours en sciences,
par la nécessaire remise en cause des dogmes antérieurs.
* chaperonines
: protéines qui guident l'enroulement d'autres protéines en cours de
synthèse et leur permettent d'accéder à leur conformation
fonctionnelle.
** organes à risques du
bœuf : les organes, qu'ils
soient consommés ou non, ont été répartis en 4 catégories (de i à
iv) d'infectiosité décroissante :
catégorie i :
système nerveux central et tout ce qui s'y relie (yeux, méninges),
catégorie ii :
ganglions lymphatiques, rate, amygdales, intestin, placenta, rein,
catégorie iii :
glandes surrénales, thymus, moelle osseuse, poumons, pancréas,
muqueuse nasale, liquide céphalo-rachidien,
catégorie iv : les
muscles sont considérés comme sains car ne présentant pas de
titre infectieux détectable.
bibliographie:
maladie de
creutzfeld-jakob et autres maladies à prion - pierre beauvais et
thierry billette de villemeur - médecine-sciences flammarion.
la recherche - n°332
de juin 2000 - vache folle : transmission expérimentale (p. 46).
pour la science - n°278 de décembre
2000 - la fonction du prion (p. 21).
quelques sites utiles sur
la toile :
www.encyclo.wanadoo.fr
www.frm.org/scientifique/sujetsfond/prions/cadprion.htm
www.infoscience.fr/dossier/prion/prion1.html
www.infobiogen.fr/people/dessen/prp
www.inra.fr/internet/produits/dpenv/vfol___5.htm
( recherche iconographique c. lievre )
origine
: france - académie de rennes - site svt - http://www.ac-rennes.fr/pedagogie/svt
Acceuil
académie de rennes - svt - articles scientifiques Quid - Sélection Web - Sciences et technologies - Documentation ... Sport de raquettes: organiser un tournois de type coupe davis Meteo France - Dossiers thématiques Nuages Comité Départemental de Rugby de Loire Atlantique - Pédagogie ... MIXTILIGNE.COM - PROFESSEUR Formation Aide du logiciel Tectoglob L’enseignement sous la coupe des marchés L’enseignement sous la coupe des marchés Secteur Robotique - Planète Sciences La Coupe d'Or - Théâtre de Rochefort Le Café Pédagogique n° 21 - Anglais Pédagogie - SVT - Woody's Wild Web Page Comité de surf de Gironde net 4 image > pédagogie > leçons de cinéma > Bruno Dumont Comité Départemental de Rugby de Loire Atlantique - Pédagogie - Le ... [[SIP2] - Site Internet Pédagogique du second degré de Mayotte] Le ... INFO KARATE - 100% pédagogie et enseignement du Karaté RFI - Les commentaires sportifs en classe de FLE Philippe Boursin - Pedagogie - Outillage scenarios Pédagogie - SVT - Woody's Wild Web Page Logiciel Cœur 2 fiche pédagogique Présentation du Mot d'Or la circonscription de Bobigny - EVENEMENTIEL - Coupe du monde de ... la circonscription de Bobigny - EPS - Rugby: La Coupe du Monde de ... Présentation du Mot d'Or la circonscription de Bobigny - EPS - Rugby: La Coupe du Monde de ... le site de l'Inspection de Tergnier - EPS - Affiche Coupe du Monde ... AM-Pédagogie :: détail de fiche 1.b. ACCORDEON : Stages, Cours, Ecoles, Pédagogie ACCORDEON ...